Maxime Pascal - Un chef d’orchestre qui veut vous plonger “à l’intérieur du son” (The New York Times)

Un chef d’orchestre qui veut vous plonger “à l’intérieur du son” (The New York Times)

Maxime Pascal se définissait, enfant, comme un dilettante musical. Dans le sud de la France où il grandit, il jouait un peu de violon et assistait aux leçons de piano que sa mère donnait. Le soir, il écoutait son père jouer du jazz New Orleans. Mais ce n’est qu’à 18 ans qu’il commence vraiment à écouter de la musique classique. Aujourd’hui pourtant, à 37 ans, Maxime Pascal est considéré comme l’un des plus grands chefs de sa génération dans le répertoire du XXe siècle, et comme un interprète essentiel de la création contemporaine. Son calendrier témoigne autant de l’ampleur de ses ambitions que de la reconnaissance qu’il suscite sur les scènes les plus prestigieuses du monde musical. « C’est un artiste fascinant, qui comprend l’époque dans laquelle nous vivons et le rôle que peut jouer le théâtre musical pour insuffler une nouvelle vie à l’opéra », déclare Pierre Audi, directeur artistique du Festival d’Aix-en-Provence. Maxime Pascal y a passé le mois de juillet avec son ensemble, Le Balcon et des comédiens de la Comédie-Française pour une version légèrement remaniée – et clivante – de L’opéra de quat’sous de Kurt Weill et Bertolt Brecht, dans une orchestration de sa propre conception. Ce mois-ci, il dirige la Philharmonie de Vienne au Festival de Salzbourg dans une rareté de Martinů, La Passion grecque. Et en novembre, à Paris, Maxime Pascal et Le Balcon poursuivront ce qu’il appelle « l'œuvre de sa vie », avec Sonntag aus Licht, cinquième volet du cycle monumental de Stockhausen, Licht – avec pour objectif de présenter l’intégralité de l’œuvre pour le centenaire du compositeur en 2028.

Au fil de ce parcours, Maxime Pascal s’est affirmé non seulement comme un chef spécialiste d’un répertoire exigeant, mais aussi comme un communicateur musical profondément convaincant. Sa gestique peut sembler très expressive ; il s’incline souvent comme s’il allait plonger dans une piscine. Mais elle n’a pas le caractère théâtral d’un Leonard Bernstein, par exemple. « Le public comprend immédiatement si un geste est sincère ou artificiel », observe Markus Hinterhäuser, directeur artistique du Festival de Salzbourg, qui invite régulièrement Maxime Pascal. « Ce qui est plus intéressant, c’est la sincérité. Et c’est ce qu’incarne Maxime. Son geste donne une compréhension immédiate de ce qui se passe. »

Cette sincérité gestuelle, Pascal dit l’avoir acquise sans y penser, dès l’enfance. Lors d’un entretien entre deux représentations de L’Opéra de quat’sous le mois dernier, il confiait que toute son éducation et son parcours musical nourrissent aujourd’hui sa manière de diriger. Né à Carcassonne, entre Toulouse et Montpellier, il n’était pas immergé dans la musique classique, mais baigné de sensations sonores qu’il ressent encore. Le timbre cuivré du trombone de son père, qu’il soit sur scène ou jouant avec un concert à la télévision. Le choc sensoriel de son premier film vu au cinéma, Aladdin, et l’impression d’être littéralement plongé dans les images et la musique. Mais surtout, il se souvient de sa première expérience dans un orchestre, qu’il décrit comme une révélation. « On comprend qu’on fait partie d’un processus d’un très haut niveau, qui existe depuis très longtemps », explique-t-il. « Musicalement, bien sûr, artistiquement, mais aussi socialement. Si tu veux savoir ce que joue l’autre enfant là-bas, tu dois écouter. C’est quelque chose de très fort. »

Lorsqu’il faut choisir une orientation, il se tourne vers la musique, et entre au Conservatoire de Paris. Il réalise vite le retard qu’il a sur ses camarades, et se lance dans un apprentissage frénétique. Il emprunte six disques par jour à la médiathèque, sans plan précis. « J’ai tout découvert en même temps », dit-il : le répertoire classique, Feldman, Grisey, Boulez… Aujourd’hui encore, il fonctionne avec la même intensité. Le Balcon ne rejoue jamais les mêmes programmes, ce qui le pousse à étudier constamment de nouvelles partitions. En un sens, il n’a jamais cessé de « rattraper son retard ». « C’est comme ça qu’on garde la curiosité d’un enfant, dit-il. On continue à s’émerveiller de petits détails jusqu’à la fin de sa vie. »

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Article de Joshua Barone, depuis Aix-en-Provence (été 2023)